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Chaque Etat apprend à dénombrer ses morts à la suite de cataclysmes environnementaux désormais récurrents. Aujourd’hui, l’Espagne compte les siens. Demain, ce sera le tour d’un autre pays. Les catastrophes écologiques s’enchaînent, tantôt spectaculaires, tantôt pernicieuses et progressant dans l’ombre, toutes effroyablement coûteuses.
S’agissant des inondations qui sont entrées dans le quotidien médiatique, l’on fait mine d’être surpris, comme si elles demeuraient inattendues et imprévisibles. Pourtant, aujourd’hui, nul n’en ignore plus les causes, liées tout d’abord à l’emballement du dérèglement climatique, mais aussi à des erreurs d’aménagement et de gestion des paysages.
La liste est longue : constructions sur des terrains vulnérables, poursuite de l’étanchéification des revêtements des sols pour les zones urbaines et périurbaines ; comblement des fossés d’évacuation des eaux au terme d’un entretien déficient ; drainage systématisé des parcelles cultivées ; assèchement des zones humides ; suppression progressive des haies ; réduction de la perméabilité des sols agricoles par épandage de pesticides pour les zones rurales, etc.
Partout, la négligence environnementale est source de coûts délibérément ignorés. Partout, aussi, la main invisible du marché témoigne de sa cécité et de son indifférence à l’égard des impacts environnementaux d’une économie remise aux intérêts particuliers. Partout, enfin, nos décideurs cultivent une paix sociale en demi-teinte à grand renfort de greenwashing politique et multiplient les jeux de rôle en trompe-l’œil, au premier rang desquels figurent les rendez-vous annuels internationaux des COP sur le climat et la biodiversité, dont plus aucune mesure ne semble ressortir.
Les catastrophes dites « naturelles », en réalité très liées aux activités humaines et à une impréparation des Etats, ont causé en 2023 des dégâts chiffrés par le réassureur allemand Munich Re à environ 228 milliards d’euros. Dans l’Hexagone, selon France Assureurs, le montant atteignait 6,5 milliards d’euros la même année. Or, le changement climatique est en train de changer d’échelle. Selon le réassureur public CCR, le coût des catastrophes naturelles pourrait bondir de 60 % d’ici à 2050.
Dans une indifférence surprenante, les discours politiques se multiplient de toutes parts pour habituer les populations à la perspective d’une adaptation, pourtant illusoire, face à un réchauffement invivable de + 4 ºC d’ici la fin du siècle. Dans notre pays, le 25 octobre, un troisième plan national d’adaptation au changement climatique (PNACC-3) était présenté. Ce faisant, les dispositions visant à réduire les émissions de gaz à effet de serre (GES) se retirent peu à peu des scènes politiques et médiatiques. Le culte de la productivité et de la libre entreprise, pourtant générateur patent de telles catastrophes, aspire à se poursuivre sans entraves.
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